Description
J’aime boire du thé. Le liquide est chaud, enveloppant, relaxant et … stimulant. Oui, “l’heure du thé” est un moment à la fois apaisant et excitant. D’une part parce que nous devons faire l’acte de nous arrêter, surseoir à un débordement d’activités pour déguster et apprécier la sapidité de la boisson. Boire à petite dose. Paradoxalement, l’excitation de la caféine nous stimule.
En est-il de même, lorsque nous prenons “l’heure du thé”, chez Diane Descôteaux. L’œuvre poétique stimule notre imaginaire, nous fait bondir dans divers lieux, nous fait ressentir mille et une odeurs, nous permet des hallucinations auditives, pour le moins que nous nous laissons imprégner de la chose. Non, l’heure du thé n’est pas un temps banal, même si cela pouvait le devenir, il suffirait pour cela de parcourir ou de lire les textes sans s’y arrêter. Comme si nous avalions d’une seule gorgée un thé parfumé. Aucune jouissance n’y émanerait. Aucune exhalaison.
En fait, “l’heure du thé” nous saisit par le souffle des saisons duquel chaque image, chaque évocation nous rappelle un temps terrestre, certes, mais aussi un temps intérieur. Un tempo saisonnier qui nous ramène à un temps présent et précis. Cela appelle les lecteurs à l’apaisement, au réconfort parfois, à une réflexion plus profonde. Du coup, sommes-nous obligés à relire et à relire certains passages, certaines suites, quelques vers voire le recueil en entier tant il évoque en nous des moments précis de notre vie. Et nous voici en méditation.
D’autre part, la stimulation vient de ce qui nous semblait anecdotique à la première lecture. Relire et s’imprégner de ce qui nous interpellait dissipe un certain flou. Ainsi, l’analyse sémique démontre que chaque unité poétique en lui-même déploie un sens formel si fort qu’un tant soit peu que nous connaissions le sens du sème évoqué, nous pouvons en faire un tableau, un arrêt sur image, un portrait auditif. Par exemple :
dans l’épais brouillard
une silhouette émerge –
plainte du huard
il nous vient une impression : un pastiche scénique d’un film d’Hitchcock, une humeur inquiète. Ou encore, pourrions-nous y voir un tableau de Van Gogh dans celui-ci :
la lune absente
et chaque étoile devient
cent fois plus luisante
Enfin, si nous nous fermions les yeux, cherchant le sommeil à travers une musique zen :
et tombe la pluie
en cadence sur le toit
contre l’insomnie
En somme, à “l’heure du thé”, tous les mots saisissent nos sens, mais nous faut-il encore savoir lire et savoir écouter ce que le poème donne à entendre, car Diane Descôteaux évoque le Québec, le Canada, ses neiges, ses étés trop courts, ses automnes aux lumières et couleurs extraordinaires, ses printemps longs et frisquets.
“l’heure du thé” c’est aussi ses traditions : le poisson d’avril et la cabane à sucre (p.16-17) notamment, la réalité sociale d’un peuple : les urgences en milieu hospitalier engorgées et inefficaces (p.61). Nous pouvons dire aussi : l’œil amusant de l’auteure lorsqu’elle illustre la désagréable sensation de recevoir une contravention pour excès de vitesse sur la route (p. 51).
“l’heure du thé” se lit finalement à toute heure du jour et de la nuit et deçà delà sans restriction.
Diane Descôteaux est active dans divers milieux de la Francophonie y obtenant ainsi de nombreux prix autant sur le continent européen qu’en Amérique du Nord. Ses œuvres sont diffusées sur maints supports papier et électroniques où il nous est possible de la lire en tout ou en partie.
Lucy PAGÉ
Un clin d’oeil sur “l’heure du thé” du journaliste québécois Patrick White en cliquant sur son site perso: http://patwhite.com/node/7887
Philippe Bouret –
Je vous ai lue avec un bonheur réel et des sourires tout aussi spontanés que votre humour ne manque pas de susciter.
Christophe Jubien –
Chère Diane, un petit mot en passant pour te dire le plaisir que j’ai pris à lire tes haïkus pleins de charme et de malice. Moi qui était par principe un peu contre l’usage de la rime dans le haïku, tu m’as retourné comme une crêpe ! Les principes volent en éclats quand le talent déboule, et c’est très bien comme ça ! Un grand merci et un grand bravo.