Description
Regard possible: Le bel ordonnancement
Dans ce recueil, Diane Descôteaux est une poète parfaitement classique, sauf pour un texte. On sent qu’elle fait de ses poèmes de multiples habitations privées, et des mots, les personnages qui y logent. Elle aime la chair des mots, leur pulpe généreuse; elle aime se mesurer Recueilmots et les mesurer. Elle a un élan plutôt joyeux et alerte, ce qui n’est nullement incompatible avec le classicisme pur de son écriture. Elle a une maîtrise parfaite de l’alexandrin, qu’elle n’utilise jamais mollement, jamais sans discernement. L’élégance formelle de son écriture est incontestable.
Les poèmes de cette Québécoise ne sont pas nourris de pensées compliquées, de thèmes philosophiques ou autres hiéroglyphes difficiles à déchiffrer. Ils parlent d’amour, de liens familiaux, de paysages, de poètes, d’histoire et de tout ce qui fait que la vie est elle-même. Ils rendent hommage aux êtres et aux choses, à la nature et à la vie, sans jamais tremper leurs pieds dans le venin. Diane Descôteaux, qui aime le bel ordonnancement de l’existence, de même qu’elle aime la belle architecture du poème et la rectitude des comportements, organise et présente grâce à ces (ses!) exigences, sa propre morale et sa propre philosophie: l’amour en est le principe, la nature en est la gloire. D’ailleurs, je crois que notre poète n’outrepasse pas ses droits sur ce qu’elle comprend du monde, et semble laisser l’invisible au Créateur, puisque:
« Or, au commencement, Dieu créa ciel et terre… »
(in Hymne à la création)
Mais, ne nous y trompons pas; Madame Descôteaux n’est pas indifférente à ce qui se trame autour d’elle. Aussi est-elle parfois encline à traiter des sujets historiques, musicaux ou mythologiques, par exemple. Elle effleure aussi la maladie ou l’avortement, évoqués dans un long poème « À propos de l’enfance… », texte qui me semble fataliste et qui traduit le déroulement d’une vie ordinaire.
« […] Or, l’avortement sait compter les derniers jours
De l’embryon fragile et, du sein de sa mère,
L’arrache et le renvoie au ventre de la terre… »
(in À propos de l’enfance…)
Certains vers qui jalonnent le recueil pourraient servir d’aphorismes et sont les révélateurs de la droiture du poète, démontrant par la même occasion comment elle « encadre » sa pensée souveraine sans lui donner une limite aléatoire dans l’esprit.
« Ayons l’air d’un lion plutôt que d’un mouton
Et ne partageons pas, avec lui, de croûton […] »
(in Rien n’arrête le vent)
Recueil d’amour, de foi, de paix, « Averse d’étoiles » rafraîchit le lecteur de sa pluie roborative et de sa lumière apaisante, sans jamais avoir cette suffisance qu’ont souvent les vers classiques actuels. Cette poésie classique jouit de la même liberté que son auteur.
Étienne PARIZE
publié dans la revue Jalons n°86
4e trimestre 2006 – Vichy, France
Avis
Il n’y a pas encore d’avis.